Quelques paysages urbains dans la peinture de la Renaissance


Avec le développement de la perspective et l'inclusion d'épisodes contemporains dans la peinture, le paysage des villes est représenté de manière réaliste, y compris quand l'oeuvre met en scène une allégorie, comme dans les fresques siennoises des "Effets du Bon et du Mauvais Gouvernement", peintes par Ambrogio Lorenzetti entre 1338 et 1339. Ces fresques montrent un paysage urbain déjà très développé, d'apparence autosuffisante, autonome, un monde clos où l'on peut observer les habitants de la ville dans leurs activités quotidiennes. Les contraintes spatiales et du sujet -la campagne est montrée séparément- et une perspective limitée font que la ville, dépourvue d'horizon, semble plus petite et encaissée qu'elle ne l'était à l'époque. Ces contraintes disparaissent, un siècle plus tard, lorsque des artistes désirent donner une vision purement architecturale de la ville, inhabitée, purement imaginaire, comme dans la "Cité idéale" attribuée à Francesco di Giorgio Martini. Ces villes célèbrent la matière et la variété des formes géométriques, mais, bien qu'elles nous apprennent beaucoup sur les aspirations des artistes, architectes et mécènes, dans leur idée de ce que devait être une ville, ne nous disent pas beaucoup sur les vraies cités-Etats de la fin du XVe siècle. En revanche, les peintres vénitiens du XVe et du XVe siècles représentent, à la fois, des scènes religieuses, allégoriques ou historiques et utilisant le cadre contemporain de Venise. C'est ainsi que le Miracle de la Relique de la Croix, de Carpaccio, est un authentique témoignage du paysage urbain de l'époque. Ce qui attire l'attention, dans les bâtiments qui bordent le canal, ce sont les cheminées, toutes identiques, mais aussi l'ancien pont en bois, qui serait détruit par un incendie peu de temps après. Le sujet religieux (la guérison d'un possédé grâce à la relique) est placé dans le déroulement d'une procession, prétexte à une scène de foule qui apparaît également chez Gentile Bellini (Miracle de la Croix au Pont de San Lorenzo). Comme chez Carpaccio, la foule chez Bellini est ordonnée, habillée élégamment ; les gens regardent ce qui se passe sur le canal, et, comme on peut constater depuis toujours, se déplacer à Venise semble plus facile par la voie des eaux. Chez Bellini, Carpaccio, ou encore chez Lazzaro Bastiani, Venise est une cité triomphante, aux bâtiments imposants et richement décorés, comme la cathédrale Saint-Marc que l'on voit dans la procession peinte par Gentile Bellini ; mais la ville est aussi vivante, avec des femmes qui se penchent aux balcons, avec le va-et-vient des gondoles et des piétons, avec ses promeneurs et ses curieux.
Inma Abbet
Images
Vittore Carpaccio, "Miracle de la Relique de la Croix au Rialto", vers 1496 (tableau entier et détail du pont)
Francesco di Giorgio Martini (attribué) "Cité idéale",vers 1470, et "Vue architecturale", 1477
Anonyme, "Cité idéale",fin XVe.
Ambrogio Lorenzetti, Allégorie et effets du Bon et du Mauvais Gouvernement (1338-1339)
Gentile Bellini, "Miracle de la Croix au Pont de San Lorenzo" (vers 1500)
Lazzaro Bastiani, "La Donation des reliques de la Sainte Croix aux confréries de l'école Saint-Jean l'évangéliste, 1494"
Gentile Bellini, "Procession du reliquaire de la Croix sur la place Saint Marc"










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